Shall we dance ? (sujet d'intégration)

Une soirée ? Peut-être était-ce là l’occasion que je cherchai pour me mêler à la masse… Bien que je ne sache pas réellement ce dont j’avais besoin à ce moment précis, je me doutais bien qu’une soirée ne serait pas de refus. Si je voulais m’épanouir un tant soit peu, il fallait que je me décide à parler un jour ou l’autre. Jouer les muets ne serait pas toujours à mon avantage. Etendu sur mon lit de camp, une jambe en dehors se balançant dans le vide, je passai mes mains derrière ma tête en la surélevant par la même occasion. Je fixai le toit en bois de la ferme où l’on m’avait gracieusement attribué une place. Lorsque ma décision de me montrer ce soir-là fut prise, ma main se posa instinctivement sur mon sac à dos, seul vestige de ma vie antérieur. D’un élan de bonne volonté, ou plutôt de désespoir à en juger par la nuit déjà bien sombre, je me relevai et m’assis sur le bord. Sans vraiment de détermination, je fouillai dans le peu d’affaires que j’avais pu emmener et mis la main sur une chemise blanche à carreaux bleus clairs et sur un jean délavé. Une fois enfilé, je descendis l’échelle et me dirigeai en trainant des pieds vers la salle de bain collective. Je n’étais pas seul, ainsi je saluai de la tête les personnes présentes et me frayai un chemin vers un lavabo pour me passer un peu d’eau sur le visage. Un miroir brisé m’offrit une vue plus que désagréable sur mon visage creusé par la fatigue et salie par la poussière. Je sortis par le même chemin et enfonçai mes mains dans mes poches en me dirigeant vers le feu de camp qui brillait au loin. J’avais pris soin d’éviter les lieux à forte densité depuis mon arrivée il y a quelques jours, mais ce soir, je ne sais pas. J’avais envie de sentir le monde autour de moi. De palper l’énergie singulière qui se dégageait de ce lieu si particulier. Cependant, je ne voulais pas attirer l’attention. Contradictoire ? Peut-être bien oui. Sûrement même, mais on dit bien qu’on ne perd jamais ses vieilles habitudes. Je passai loin du feu et m’assis à l’opposé du petit groupe. Je ne reconnaissais qu’un homme de mon dortoir que j’avais été amené à croiser les rares fois où je m’étais aventuré hors de mon lit. Je sortis de la poche de ma chemise une cigarette que j’allumais à l’aide d’un briquet coincé dans le paquet que je rangeai rapidement après. Puis, je tendis l’oreille. Ce que j’aime ici, c’est que personne ne s’intéresse sincèrement à ton histoire, tu peux raconter n’importe quoi, ils te croiront. Dans mon cas, je n’ai rien dit à personne. Je pourrais, si j’en avais envie, mais être le dernier débarqué me suffit déjà comme dose d’attention. En les entendant parler de tout et de rien, mon visage s’illuminait malgré moi. La vie semblait tellement simple ici que ça en paraîtrait presque irréel…

Encore et toujours perdu au fin fond de mes pensées, j’en fus tiré par un chien en tout point adorable qui était sorti de nulle part. Je me baissai lentement et posai ma main sur son dos après qu’il se soit couché à mes pieds. Il ne bougeait plus et s’allongea même encore plus confortablement lorsque je me mis à le caresser. Il me rappelait le chien que mes parents m’avaient ramené pour mes dix ans. Le chien se releva soudain et je relevai la tête en même temps, découvrant de longues jambes fines puis un visage souriant qui resplendissait de bienveillance. Je restai un moment à la regarder sans rien dire avant de faire un léger signe de la main pour lui faire comprendre que ça m’était bien égal de l’avoir allongé à mes pieds. Je détournai ensuite les yeux pour ne pas avoir à faire avec son regard qui m’incitait à lui parler et replongeai mes yeux dans les flammes rougeoyantes qui dansaient devant moi. Je tirai une bouffée sur ma cigarette et soufflai un rond de fumée blanchâtre avant de la jeter dans le foyer. Je me tâtai à lui adresse la parole. Elle n’était pas méchante, ça se voyait dès le premier coup d’œil, mais il y avait quelque chose qui me perturbait quand même. Enfin, après quelques secondes de vifs échanges entre mon cœur et mon cerveau, je m’éclaircis la gorge et tournai la tête vers elle.

LENNY – « Tu… Euhm… Tu veux t’asseoir ? »

Oui, je l’avoue, je n’ai jamais été très doué pour discuter avec une fille et ce que j’avais vécu ne facilitait guère les choses. Je la regardai s’asseoir d’une façon que je pourrais presque qualifier d’élégante, ce qui m’étonna en comparaison aux rares femmes que j’avais pu croiser jusqu’alors.

LENNY – « Je m’appelle Cy… Lenny ! Et toi ? »

Encore une hésitation, mais celle-ci était un peu plus ennuyeuse que la précédente. On m’avait appelé Lenny en arrivant ici et je ne voulais pas que tout le monde puisse savoir qui je suis. Enfin, je ne pense pas non plus que quelqu’un puisse faire un lien entre mon père et moi après tous les moyens expérimentés pour qu’on ne puisse justement faire aucun lien entre nous.